Apparemment, la fin des temps, c’était hier. Sauf que moi, je me suis pas réveillée, et visiblement on m’a juste oubliée dans un coin. Je veux dire, la ville est toujours là, intacte, les feux passent encore du rouge au vert, il y a de l’électricité, mais dans les rues, personne. PERSONNE ! Nom de dieu, mais qu’est-ce que je vais faire toute seule sur ce monde ? Je veux pas finir comme ces naufragés qui en viennent à parler à des ballons de volley pour se tenir compagnie, ou ces mecs en cellule d’isolement qui finissent par oublier leur propre nom. Céline, Céline, Céline, Céline, Céline ! Wilson ?
Et mes parents, mes amis, où ils sont ? Il n’y en a pas un qui a pensé à dire au cortège céleste « eh, attendez, Céline n’est pas là, faut retourner la chercher » ? Est-ce qu’ils pensaient que ce serait mieux pour moi de ne pas partir avec les autres, de rester, dernier vestige de l’humanité dans ce monde perdu ? Ou est-ce que ça leur fait plaisir de ne plus voir ma tronche, ah tiens on a oublié Céline, bon débarras, elle faisait que nous causer des ennuis de toutes façons ? A bien y réfléchir, maman m’a toujours regardé bizarre, genre « qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu pour mériter un tel purgatoire », c’est surement pas elle qui m’aurait repêchée. Et papa a toujours fait ses quatre volontés, il se serait juste rangé derrière elle, comme d’habitude. Quand à mes amis… Elsa et Antoine sont toujours à me faire des crasses, Julie est carrément jalouse depuis que j’ai chopé son ex Théo en soirée, Nathalie est une vraie vipère, je la déteste. Vraiment pas un pour rattraper l’autre.
Je… oh, ça bouge par là-bas. Un chien errant ? Non, on dirait plutôt un type en voiture. Hhmmm, peut-être que c’était pas la fin du monde en fin de compte. On est juste très tôt, 4h32, samedi matin, et la ville est plus déserte que jamais. Ouf ! Mais la prochaine fois que c’est la fin du monde, ils ont pas intérêt à me refaire un coup pareil, c’est moi qui vous le dis !
Date d’écriture: 2017